Formulaire de recherche


SNJ - 33 rue du Louvre - Paris 75002 - 01 42 36 84 23 - snj@snj.fr - Horaires


SE DÉFENDRE

Union syndicale Solidaires

Communication sur le web

Quels usages ? Quelles responsabilités juridiques ?

Les outils de communication évoluant, les organisations syndicales professionnelles ou locales utilisent des outils de communication en ligne et font parfois le choix d’être présent-es sur les réseaux sociaux. Boites mails professionnelles, intranet, site web, blog, facebook, twitter… il s’agira ici de faire un tour d’horizon des moyens de communications et des usages adaptés de chacun d’entre eux afin de minimiser les risques juridiques.

Il s’agit ici de rappeler les règles législatives encadrant les usages, il est fréquent d’y déroger soit par usage soit par choix lors d’une mobilisation. Il ne s’agit pas de juger du bien fondé ou non de telles prises de libertés mais de donner les textes de lois et les jurisprudences : dit autrement, pour pouvoir dépasser la limite, il faut la connaitre.

Les boites mails pro et la communication via l’intranet de l’entreprise

  • Utilisation pour communication syndicale

L’article L. 2142-6 du Code du travail stipule qu’ : "Un accord d’entreprise peut autoriser la mise à disposition des publications et tracts de nature syndicale, soit sur un site syndical mis en place sur l’intranet de l’entreprise, soit par diffusion sur la messagerie électronique de l’entreprise. Dans ce dernier cas, cette diffusion doit être compatible avec les exigences de bon fonctionnement du réseau informatique de l’entreprise et ne doit pas entraver l’accomplissement du travail » ; « L’accord d’entreprise définit les modalités de cette mise à disposition ou de ce mode de diffusion, en précisant notamment les conditions d’accès des organisations syndicales et les règles techniques visant à préserver la liberté de choix des salariés d’accepter ou de refuser un message"

C'est-à-dire qu’en dehors d’un accord d’entreprise, il n’est pas légal d’utiliser les boites mails professionnelles ou l'intranet pour diffuser une information syndicale. Il y a donc un enjeu à obtenir des accords d’entreprise sur le sujet.

Cet article de loi reste la base de la communication via les mails ou via l’intranet de l’entreprise, la CFDT avait posé une question prioritaire de constitutionalité estimant que le fait que cette forme de communication soit soumise à l’agrément du patron constitué une atteinte à la liberté d’expression syndicale, en 2013 le Conseil Constitutionnel a jugé que cela n’était pas le cas. [1]

Dans cette même décision, le conseil constitutionnel a indiqué que si l’employeur ne prévoyait pas de communication via les boites mails pro ou l’intranet de l’entreprise, les syndicats peuvent, en dehors des outils professionnels, mettre en ligne des informations sur le web et inciter les salarié-es à s’inscrire (démarche volontariste de la part du salarié) afin de recevoir par mail les informations syndicales. Le texte est ainsi rédigé : « qu'en l'absence d'accord d'entreprise relatif à l'utilisation de l'intranet ou de la messagerie électronique de l'entreprise, les syndicats peuvent, outre l'application des dispositions du premier alinéa de l'article L. 2142-3 du code du travail et de son article L. 2142-4, librement diffuser des publications et tracts sur les réseaux de communication au public en ligne ; que les salariés peuvent également librement y accéder sur ces réseaux ; qu'ils peuvent s'inscrire sur des listes de diffusion afin de recevoir par voie électronique les publications et tracts syndicaux ».  Voir communication au travers d’un blog ou d’un site web

  • Appel à saturer les boites mails ou au détournement d’un progiciel

Il est fréquent lors des mobilisations d’appeler à saturer la boite mail d'un décideur (directeur, élu, responsable politique,…). Si cette technique à fait les preuves de son efficacité dans des réseaux type RESF (donc informel) elle est juridiquement risquée dans la cadre syndical. Dans le même sens circule parfois aussi certains appels à ne pas utiliser correctement les progiciels, ou à en effacer certaine données.

Il faut cependant savoir que  « Le fait d'entraver ou de fausser le fonctionnement d'un système de traitement automatisé de données est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. Lorsque cette infraction a été commise à l'encontre d'un système de traitement automatisé de données à caractère personnel mis en œuvre par l'Etat, la peine est portée à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 € d'amende. »  (Article 323-2 du Code pénal) et « Le fait d'accéder ou de se maintenir, frauduleusement, dans tout ou partie d'un système de traitement automatisé de données est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. Lorsqu'il en est résulté soit la suppression ou la modification de données contenues dans le système, soit une altération du fonctionnement de ce système, la peine est de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. Lorsque les infractions prévues aux deux premiers alinéas ont été commises à l'encontre d'un système de traitement automatisé de données à caractère personnel mis en œuvre par l'Etat, la peine est portée à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 € d'amende. » (Article L323-1 du Code Pénal).

Ces articles du Code pénal n’ont pas uniquement pour but de faire peur, ils sont régulièrement appliqués par les tribunaux. L’une des plus célèbres jurisprudences date des grèves contre la réforme des retraites de 2003, La Droite Libre avait appelé à pourrir les boites mails de la FSU lors d’une action "Ils bloquent la France, bloquons leurs mails !", la FSU alliée à d’autres syndicats a obtenu leur condamnation sur le fondement de ces articles. [2]

L'employeur est propriétaire du domaine @chezlepatron.con, communiquer depuis une boite mail professionnelles hébergée par l'employeur présente donc des risques importants. En effet si l'employeur ne peut lire (légalement) les e-mails échangés, il a la possibilité pour mieux gérer son système d'examiner les échanges c'est-à-dire de voir le nombre et le volume des messages échangés, de connaitre les destinataires… bref des informations qui dans le cadre d'un  travail syndical ne sont pas nécessairement à mettre dans les mains de l'employeur. S’il peut parfois s'avérer utile de posséder une adresse sud@chezlepatron.con par exemple pour envoyer à l'ensemble des salariés via une mailing list, cette boite doit être utilisée à minima en raison du risque de surveillance de son usage par l'employeur.

En complément: http://www.cnil.fr/linstitution/actualite/article/article/lutilisation-de-lintranet-et-de-la-messagerie-electronique-de-lentreprise-par-les-organisa/

Le blog/site web (en dehors de l'intranet)

  •  Gestion d’un blog/site web

« La communication au public par voie électronique est libre. » Art. 1er alinéa 1er de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

C'est-à-dire qu’un blog/site web  d’une section ou d’un syndicat accessible à tou-tes peut être librement créé en dehors de l’entreprise, qu’il peut être animé  par n’importe quel personne qui en détient les codes d’accès.

Il doit obligatoirement y figurer une page indiquant le gestionnaire du site, à ce titre il est plus que souhaitable que le site soit géré (et donc payé) par la section ou le syndicat départemental et non par un-e militant-e en son nom propre.

Si des poursuites devaient être engagées suite à des propos tenus sur celui-ci,  elle pourraient l’être contre le gestionnaire (donc le syndicat ou la section)  et/ou contre l’auteur de l'article incriminé. L’une des solutions peut être de ne pas signer les articles en son nom propre afin que ce soit toujours et uniquement le syndicat qui puisse être poursuivi.

 

Ce qu’on peut écrire sur un blog/site web relève des mêmes règles que dans un tract, le support change mais le fond est le même. Attention toutefois, un certain nombre de documents affichés librement dans l’entreprise ont un caractère confidentiel et ne peuvent en aucuns cas être diffusé sur un site web/blog extérieur à l’entreprise : PV du CHCT ou du CE, PV de réunion délégués du personnel/direction, éléments liés à la mise en œuvre d’un droit d’alerte au sein de l’entreprise ainsi que tout les documents revêtant un caractère confidentiel ET présentés comme tels par l'employeur.

  • Gestion des commentaires d’un blog/site web

La question de la responsabilité du contenu des commentaires sous les articles est fréquemment posée : c’est l’auteur du commentaire qui est responsable de ses propos et en cas de délit il pourra être poursuivi.

Le gestionnaire du site peut également être poursuivi mais toujours avec l’auteur des commentaires, il est impossible de poursuivre uniquement le gestionnaire. Lorsque le directeur ou le codirecteur de la publication sera mis en cause, l'auteur sera poursuivi comme complice. Article 93-3 de la loi du 29 juillet 1982

Attention, le gestionnaire du site web/blog pourra être poursuivi également si il y a une modération à priori des commentaires et qu’il a donc volontairement laissé paraître un commentaire délictueux.

Le gestionnaire du site ne pourra pas être poursuivi s’il n’avait pas connaissance des commentaires avant leurs mises en ligne et s’il a rapidement supprimé les commentaires dès qu’il en a eu connaissance. Lorsque l'infraction résulte du contenu d'un message adressé par un internaute à un service de communication au public en ligne et mis par ce service à la disposition du public dans un espace de contributions personnelles identifié comme tel, le directeur ou le codirecteur de publication ne peut pas voir sa responsabilité pénale engagée comme auteur principal s'il est établi qu'il n'avait pas effectivement connaissance du message avant sa mise en ligne ou si, dès le moment où il en a eu connaissance, il a agi promptement pour retirer ce message. Article 93-3 de la loi du 29 juillet 1982.

  • Les réseaux sociaux : facebook, twitter

Nous parlons ici des comptes syndicaux, c'est-à-dire portant un nom syndical et non du compte d’un-e camarade en son nom propre même s’il anime celui-ci en mettant en avant son appartenance syndicale.

Les règles sont les mêmes que pour le blog/site web. Il s’agit d’un support de communication différent mais les propos qui y sont tenus obéissent aux mêmes règles que ceux de la communication syndicale traditionnelle.

De la même manière que sur un site web/blog certains documents ne doivent pas être diffusés sur ces réseaux.

Il est nécessaire d’être particulièrement vigilant aux post sur les réseaux sociaux, en effet avec l’usage des smartphones, la rapidité de mise en ligne des contenus peut s’avérer dangereuse, en effet certaines publications postées sous le coup de la colère peuvent, avec le recul ne pas être adaptées à une communication syndicale.

Il y a peu de risque juridique en ce qui concerne les interactions sur twitter.

La question des commentaires sur facebook se traite de la même manière que sur un blog/site web. On ne peut être tenu responsable des commentaires suivants nos publications qu’à partir du moment où l’on en a eu connaissance et où nous n’avons rien mis en œuvre pour les faire disparaître. Le débat tourne autour de la notion « du moment où l’on a eu connaissance », ce moment peut être daté par plusieurs moyens : publication d’un nouveau post sur le mur sans suppression du commentaire sous un ancien, indication en garde à vue du fait que l’on consulte facebook environ 4 fois par jour alors que le commentaire est resté 5 jours, réponse à un autre commentaire suivant celui incriminé. [3]

Facebook offre également la possibilité pour « les amis » de publier sur le mur de l’autre, « les amis » facebook dans le cadre d’une page syndicale n’étant que de potentiels lecteurs dont nous ne connaissons pas toujours les valeurs et opinions, il est conseillé de désactiver cette possibilité de partage d’une publication par « un ami » dans les paramètres de la page.


  1. http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/l...
  2. http://www.legalis.net/spip.php?page=jurisprudence-decision&id_article=52
  3. http://www.liberation.fr/politiques/2013/10/18/racisme-sur-facebook-un-c...
Document(s) joint(s) : PDF icon Télécharger le document Solidaires
le 02 Septembre 2015

Thèmes : Solidaires

accès pour tous