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Section SNJ Aquitaine

Sud Ouest

Risques psychosociaux à la rédaction : attention à ne pas tomber dans le déni


Mardi 21 décembre, lors de la réunion du CSE de la Sapeso, la CSSCT (commission santé sécurité et conditions de travail) a rendu son rapport sur les risques psychosociaux à la rédaction suite au déploiement de l'outil éditorial CUE. Pour rappel, elle avait été saisie en juillet dernier par tous les élus du CSE, à l'initiative du SNJ, pour évaluer par délégation ces risques, suite à des témoignages recueillis depuis plusieurs mois par les élus du syndicat représentatif de la rédaction sur des situations de travail inquiétantes vécues par des collègues dans différents services.

Que dit la CSSCT six mois plus tard ? Que lors des entretiens menés auprès des journalistes qu'elle a pu rencontrer entre le mois de septembre et novembre 2021 dans les rédactions de Bayonne, La Rochelle, Rochefort, Agen, Périgueux, Mont-de-Marsan et Bordeaux-Bastide, « [elle] a pu constater des situations de profond mal-être, de souffrance et du stress, tant au niveau des relations humaines que face au matériel (CUE). Elle a pu constater que des journalistes sont en arrêt-maladie en raison de leurs conditions de travail. À la suite de ces divers entretiens, nous avons pris conscience qu’un certain nombre de témoignages similaires revenaient souvent, notamment sur les problèmes d’organisation dans la Rédaction, les conflits hiérarchiques, la perte de sens du métier, un manque important de considération et d’écoute, la hiérarchisation de l’information, le choix des sujets, la verticalité des décisions…»

Face à ce constat de souffrance au travail avérée et de risques psychosociaux à la rédaction, les élus SNJ du CSE ont rappelé que l'employeur est responsable de la santé au travail des salariés. De fait, face à ce rapport qui a valeur légale, les élus du syndicat des journalistes ont demandé à la direction quel plan d'actions elle allait mettre en place, de quelle manière et selon quel calendrier ? Tout en indiquant que l'échéance du CSE de février 2022 semblait correcte, pour avoir le temps d'apporter une réponse à la hauteur des enjeux et des attentes.

Patrick Venries, président directeur général de la Sapeso, a d'abord indiqué qu'il venait « de prendre connaissance du rapport » et qu'il mènerait une concertation d'ici à février. Cependant, quand le SNJ a évoqué la perte de sens du métier qui est citée dans le rapport, il a répondu qu'on « [était] dans la métaphysique, la psychanalyse. C'est extrapolé ». Étrange déni de la part d'un responsable qui, par ailleurs, engage les salariés à trouver la « raison d'être » de l'entreprise dans le cadre de la démarche RSE.

Christophe Galichon, directeur des opérations et de la rédaction, a surtout insisté sur l'approche technique de la question, assurant que beaucoup de problèmes du logiciel ont été résolus grâce à un important travail fourni, notamment par le Groupe Arche. Rappelons ici que la mise en place de la commission technique de suivi du déploiement de CUE, qui a pour objet de faire un point régulier sur les fonctionnalités et la prise en main de l'outil, n'est pas à l'initiative de la direction, mais bien à celle des élus SNJ qui en ont fait la demande auprès du CSE.

Le SNJ a acquiescé, mais a insisté sur le fait que les équipes ont été, ou sont encore, laissées dans le stress du travail à réaliser malgré tout, quelles que soient les conditions et le temps de la résolution des problèmes. D'autant que le phénomène de mal-être au travail ne peut se résumer aux seuls problèmes techniques. Il est lié à d'autres facteurs révélés par le rapport : nouvelles organisations du travail parfois mal vécues qui pèsent sur les relations avec la hiérarchie ou entre collègues, partage des tâches questionnables, perte d'autonomie et/ou sentiment d'isolement, manque de dialogue et de réflexion partagée sur les choix éditoriaux, etc.

Sur le management et les problèmes d'organisation, Christophe Galichon a avancé qu'un « plan d'actions » était d'ores et déjà en œuvre, depuis la rentrée de septembre. Pour rappel, la CSSCT a mené son enquête entre septembre et novembre. Elle fait état d'évolutions des organisations opérées dans certains services, certes, mais pas partout, et pas sur tous les sujets. Avec des solutions disparates, comme la polyvalence, ou la spécialisation d'éditeurs web ou print, qui méritent d'être discutées à l'échelle de la rédaction.

A propos de la gestion des plannings révélée dans le rapport de la CSSCT et que ne cessent de pointer du doigt les élus du SNJ depuis des années, Christophe Galichon a concédé que « c'est un sujet sur lequel on doit s’améliorer ».

La DRH de Sapeso, Nadine Luzeux, a précisé que dans sa réponse, la direction ne parlera que des situations générales et pas des cas particuliers. Le SNJ appelle de ses vœux les considérations générales de la direction sur les conditions de travail à la rédaction. Car en effet, quand un collègue craque au bureau, fait part de son mal-être face aux tâches qu'il a à effectuer, ou de son stress face à sa charge de travail, ce n'est pas simplement une situation individuelle à résoudre : ce sont bien des symptômes d'un dysfonctionnement collectif, lié aux organisations de travail et à l'outil.

A partir des constats de la CSSCT, le SNJ a évoqué en séance les sujets sur lesquels il lui apparaît urgent d'agir.

- les organisations de travail et la charge de travail (au quotidien, entre la semaine et le week-end) ;

- le management (pour en finir avec les injonctions brutales ou contradictoires, le sentiment de parler sans être entendu) ;

- les plannings (vraiment réalisés à six mois comme le prévoient les accords d'entreprise. La situation sanitaire, souvent invoquée, ne peut suffire à justifier des plannings faits à 15 jours ou un mois, d'autant que cela existait avant le Covid. C'est bien que d'autres freins sont à l'origine de cette situation) ;

- le sentiment de perte de sens du métier ;

- l'instabilité du système éditorial et le sentiment d'insécurité à travailler avec qui peut en découler.

Si la CSSCT a fait des préconisations à étudier dans son rapport, le syndicat représentatif des journalistes de la rédaction de "Sud Ouest" en a également à faire et se propose de travailler en concertation avec la direction sur ces thèmes, à partir des remontées du terrain.

Aux collègues, nombreux, qui sont venus témoigner de leurs difficultés et interrogations au quotidien, le SNJ veut dire que cette démarche n'a pas été vaine, puisqu'elle s'inscrit dans un processus légal concernant les situations de RPS dans une entreprise. L'employeur a obligation d'assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs et leurs conditions de travail, conformément à l'article L.4121-1 du Code du travail rappelé à la fin de ce rapport.

La prochaine étape sera, entre autres, le plan d'actions présenté par la direction de la Sapeso en février, ainsi que les moyens qu'elle mettra en œuvre pour le réaliser. Il va de soi que la direction, mais aussi les élus du CSE, devront en évaluer ses effets sur la santé et les conditions de travail des journalistes. Les élus du SNJ y veilleront afin que cette saisine de la CSSCT n'en reste pas à l'état de simple constat. Nous tenons d'ailleurs ici à remercier, comme nous l'avons fait en CSE, les membres de l'instance pour le travail accompli auprès des salariés, dans le respect de l'anonymat.

Enfin, que ceux qui ont pris la parole ces dernières semaines continuent de s'exprimer, comme ceux qui ne l'ont pas encore fait, auprès des élus du SNJ, des managers, de la secrétaire générale de la rédaction, de la CSSCT, des médecins du travail ou de l'infirmière du service médical de l'entreprise, ou encore via la procédure d'alerte RPS de l'entreprise en cas d'urgence ou de situation grave. Le stress et le mal-être au travail ne sont pas des fatalités et encore une fois, ce sont des problématiques collectives à régler collectivement. Il est temps que ce soit fait.

 

Bordeaux, le 27 Décembre 2021

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