Formulaire de recherche


SNJ - 33 rue du Louvre - Paris 75002 - 01 42 36 84 23 - snj@snj.fr - Horaires


Communiqués de presse, Formation

« Passeport professionnel »

Le SNJ d’accord sur le principe, pas sur le contenu

Le Syndicat National des Journalistes, première organisation de la profession, se félicite de la volonté désormais affichée de faire en sorte que tous les journalistes reçoivent une formation aux fondamentaux du journalisme. Il s’agit d’une impérieuse nécessité pour une profession qui a la particularité d’être ouverte (près de trois quarts des journalistes ne suivent pas de cursus de formation initiale) et tient à le rester.

En octobre 2008, dans le cadre des Etats généraux de la presse écrite, le SNJ avait été parmi les premiers à proposer la mise en place d’une « plate-forme » réunissant les écoles abritant des cursus reconnus afin de former, dans les trois premières années d’exercice de la profession, les journalistes n’ayant pas connu de formation initiale. « Le soin de définir la durée, le contenu et les modalités de cette formation pourrait être confié à la CPNEJ », écrivait-il alors. Il souhaite qu’une telle formation soit reconnue comme une priorité de branche par les partenaires sociaux.

Si sérieuse et précieuse soit-elle, la formation « sur le tas » a en effet ses limites. Outre qu’elle ne profite pas à tous les nouveaux journalistes – les pigistes notamment – elle est essentiellement centrée sur le savoir-faire propre à l’entreprise d’accueil, sa ligne éditoriale et le lien de subordination qui s’y rattache, son seul cadre rédactionnel et les outils qui y sont utilisés, ainsi que ses « cibles » en termes d’auditoire. Ce « compagnonnage » à vocation pragmatique, voire uniquement technique, s’étend rarement à l’ensemble des règles du journalisme, aux fondements du droit de la presse, ou encore aux grands principes professionnels que sont la déontologie ou la protection des sources.

Pour le SNJ, l’enjeu du dispositif à mettre en place est donc bien de compléter l’acquisition restreinte faite en entreprise pour élargir l’horizon professionnel des nouveaux venus aux fondamentaux du journalisme, son rôle, ce qu’il compte de droits et de devoirs, ce que contient comme exigences la mission d’informer les citoyens dans une société démocratique. Pour cette raison, même s’il soutient pleinement la démarche menée dans le cadre de la Conférence nationale des métiers du journalisme, le SNJ ne se retrouve pas dans les premières propositions faites par le groupe de travail « passeport professionnel ». A quelques exceptions près, les enseignements prévus relèvent beaucoup plus de la pratique que des principes professionnels, ce qui ne va pas suffisamment dans le sens de l’objectif essentiel qui doit être poursuivi.

Quand on découvre le contenu du « programme » proposé – apprendre à « réajuster sa production selon les évolutions du public », « constituer sa propre documentation », ou encore « lire les tableaux et les indicateurs du contrôle de gestion et du contrôle budgétaire » – on ne peut s’empêcher de penser que la montagne a accouché d’une souris ! Sont-ce là les véritables enjeux recherchés ? Est-ce bien l’objectif voulu par les Etats généraux que de limiter un tel dispositif à l’acquisition d’un « savoir-faire » – l’expression est inscrite en toutes lettres – que l’entreprise est à même d’apporter ?

En outre, le SNJ s’élève vigoureusement contre un passage du préambule disant que la déontologie professionnelle peut « être rapportée aux cadres économiques dans lesquels sont insérés les médias ». Autrement dit, qu’elle puisse être à géométrie variable, selon le bon vouloir des gestionnaires des entreprises de presse.

Là encore, il faut revenir aux Etats généraux de la presse écrite et rappeler qu’ils se sont prononcés sans ambiguïté pour la reconnaissance par toute la profession d’un texte unique qui soit un « tronc commun » d’exigences déontologiques. Une ambition forte devant permettre de regagner une part de la confiance perdue auprès de l’opinion publique, et passant par l’annexion d’un tel « texte unique » à la convention collective nationale de travail des journalistes (« Livre vert », page 12).

Or, cette proposition ambitieuse, les patrons de presse écrite – qui étaient pourtant très largement majoritaires aux Etats généraux – ne veulent plus en entendre parler. Le front uni de leurs organisations professionnelles contre toute reconnaissance officielle d’une charte déontologique par la profession tout entière est déjà responsable de l’échec de la démarche engagée par Bruno Frappat et son « comité des sages », à la suite de ces mêmes Etats généraux. Dans le cadre de la Conférence nationale et du projet de « passeport professionnel », ils tentent de récidiver. Ce n’est pas acceptable.

De son côté, le SNJ, qui a soutenu sans réserve cette ambition, a rempli ses engagements en mettant à la disposition de la profession une nouvelle version de sa charte fondatrice qui, depuis 93 ans, sert de référence en la matière. En cela, il a voulu tenir compte à la fois de l’émergence de nouveaux supports de diffusion de l’information et des effets de la crise sévissant dans les entreprises de presse, qui modifient profondément l’exercice de la profession. Redisons-le : il serait incompréhensible aujourd’hui que la formation proposée à la majorité des nouveaux journalistes ne se fasse pas sur la base d’un tel texte commun et fédérateur mais, au contraire, en prenant en compte des initiatives pour le moins disparates et quelquefois sujettes à caution.

Enfin, le SNJ rappelle que la législation fait peser l’obligation de formation avant tout sur l’employeur et non sur le journaliste, en poste ou pigiste, qui n’a pas à utiliser a priori son DIF et certainement pas un CIF pour suivre un tel parcours. Celui-ci doit être considéré comme du temps de travail et donner lieu, pendant sa réalisation, au maintien de la rémunération par l’entreprise. Sur ce point, le « passeport professionnel » – une appellation à reconsidérer car n’étant pas appropriée – doit se montrer sans ambiguïté.

 

le 27 Septembre 2011

accès pour tous