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LE SYNDICAT

Les travaux du SNJ

Contributions

De : david larbre

Envoyé : jeudi 21 décembre 2006 17:55

REAGISSONS Voilà un compte rendu édifiant qui confirme ce qui se lance dans l’ensemble des quotidiens de France et de Navarre. Si je devais décrire ce qui se passe à La Tribune, à l’Equipe... j’écrirais strictement là même chose.

Il est temps de réagir. Préparons une journée d’action dans tous les quotidiens concernés. Fixons une date en janvier avec envoi dans le même temps de demande d’ouverture de négos nationales, je dis bien nationales, battons le rappel des troupes et préparons les intersyndicales. Je demande solennellement au BN de mettre cette question à l’ordre du jour.

Pour revenir à notre journée d’aujourd’hui : je met par écris, mais de manière rapide, ce que j’ai dis ce matin en ouverture. Je développerai ultérieurement mes propositions.

1) Utiliser les moyens actuellement à notre disposition (convention collective ; accords nationaux, régionaux, d’entreprise) pour ralentir le processus. Objectif : donner du temps pour mener rapidement une réflexion pour imaginer l’avenir. Nous ne pourrons aller contre Internet. Il ne s’agit pas pour autant d’accepter ce qui nous est imposé. Il s’agit d’accompagner ce processus, ce bouleversement, avec des propositions novatrices. Nous ne pouvons nous contenter de défendre nos acquis aux risque certain d’être marginalisé et inefficace (CQFD : la Filpac). Il faut dès à présent faire émerger des propositions innovantes et radicalement nouvelles sur les conditions d’exercice de notre métier. D’une seule que je formulerais ici "l’information n’est pas une marchandise comme les autres" découle énormément de problématiques propres à faire émerger nombre d’idées nouvelles. Voilà une idée que je défend.

Il faut aussi imaginer de nouveaux droits syndicaux. En effet il y a de multiples menaces sur l’exercice de notre métier, mais n’oublions pas les droits syndicaux sans lesquels rien n’est possible. Je vous livre une piste que je suis en train d’explorer. En 1980, le programme commun avait prévu des avancées lourdes en matière de droit syndical. Peu ont été réellement lises en œuvre (lois Auroux). Certaines pourraient être reprises. A creuser donc. Et menons aussi la réflexion pour faire émerger de nouveaux droits. Interrogeons la base.

2) Il faut interpeller les candidats de la gauche à la présidentielle avec nos propositions. Ne laissons pas passer cette occasion au risque d’attendre encore 5 ans. (Sauf que je crains que dans 5 ans il reste bien peu d’entre nous vu la vitesse à laquelle notre métier se transforme et les transformations seront faites). Il s’agit de les rencontrer physiquement et pas par courrier ou mail. Il n’est plus temps. Je peux organiser des rencontres à haut niveau avec le PS et le PC. Nous devons trouver les moyens de faire reprendre nos idées. EXEMPLE : Nos journalistes doivent interpeller les politiques à chaque fois qu"ils les rencontrent, et ce à partir d’un tout petit questionnaire que nous transmettrons à tous.J’en ai d’autres.

3) Il faut sortir de nos bureaux syndicaux. Les syndicats ont une base. Nous lers premiers vu notre représentativité (CCIJP). Nous ne pouvons plus l’ignorer. Il faut nous en servir. Il faut donner du poids à nos négociateurs. Il faut créer un rapport de force pour obliger le patronat à ouvrir des négos. Je travaille d’ors et déjà au lancement d’une coordination parisienne. Des contacts ont été pris avec FO et une première rencontre est envisagée début janvier. Le but est de faire venir de journalistes de tous les quotidiens pour faire émerger des propositions communes, les plus large possible pour que chaque syndicat puisse s’y agréger. Il s’agira ensuite d’imaginer des actions de tous ordres pour nous faire entendre. De plus, nul doute que la base aura des idées à nous faire passer.

Voilà pour l’instant. L’urgence est forte. Nous devons agir. Il va falloir taper. Fort et vite. Face à cette déclaration de guerre concertée et générale lancée par les patrons de presse, le temps des demi-mesures est passé. Nous avons déjà perdu beaucoup de temps. Dans tous les cas nous ne sommes pas en mesure de résister aux niveau des entreprises. Il faut donc élargir la contestation au risque de programmer notre disparition progressive.

Merci.

De : didier.labertrandie

Envoyé : mardi 9 janvier 2007 09:22

DU TITRE A LA MARQUE : vers la marchandisation de l’information.

L’actuelle montée en puissance du multimedia liée à l’avènement d’Internet, poussée par des patrons qui fréquemment n’hésitent pas à l’imposer sans aucune négociation préalable (et, tout aussi inquiétant, avec l’aval sinon l’indifférence d’une partie des Rédactions) pose à mes yeux des questions qui vont bien au-delà d’une simple mais à elle seule insupportable dégradation des conditions de travail liée à la surcharge de travail qu’un tel développement entraîne.

Et je pense que si nous voulons nous battre efficacement contre ce que je considère comme une marchandisation aboutie de l’information, ce n’est pas qu’en nous protégeant derrière le bouclier du code du travail ou de la convention collective qu’on y parviendra. D’abord car je crains bien que d’ici quelques mois, une fois les élections passées, le code du travail ne perde ce qui en faisait encore sa force, avec la remise en question de la hiérarchie des normes que l’on sent se profiler à grand pas ...

Plus fondamentalement, au vu de ce qui est remonté via notre liste de diffusion Internet, de ce que l’on entend de plus en plus se répandre dans la bouche de nos patrons, et de ce que l’on voit d’ailleurs arriver sournoisement dans nos entreprises de presse, l’impression générale qui en ressort, à mon avis, est que le multimedia servira de cheval de Troie à cette marchandisation à outrance. Le glissement de la notion de titre vers celle de marque en constitue le plus voyant des symptômes.

Dans la lettre que l’intersyndicale (CFDT, CGT, SNJ, CGC) et le comité de vigilance de HFM viennent d’adresser à Lagardère, le 19 décembre, je trouve que cette question est très bien posée. Je cite : "Notre avenir serait, dit-on, dans la "brand factory", l’usine à marques. Nous en possédons de "très fortes" comme Elle, Paris Match... et l’objectif consisterait à les décliner de toutes les manières possibles. Essentiellement sur le Net puisque le papier est, selon vous, menacé. Notre groupe mettrait donc le cap sur une stricte édition de contenus.

En ce qui nous concerne, plutôt que de marques, nous préférons parler de titres. Nulle coquetterie dans l’affaire. Les marques s’entretiennent par des campagnes de pub. Au contraire du titre, qui fonctionne surtout sur l’existence d’un lien, d’une confiance avec ses lecteurs tissés au fil des parutions. Ce lien est-il soluble dans la séduction publicitaire ? Nous ne le pensons pas. Il est l’expression d’une double indépendance, éditoriale et rédactionnelle."

Les patrons, pour leur part, ont-ils eu si besoin que ça de se concerter avant d’avancer leurs pions, tant leur vision semble coller à l’air du temps ? Lors du dernier BN, on nous faisait ainsi état de la position prise par le SPQN, qui préfère désormais parler en terme de marque quand il évoque le développement du multimédia.

Le problème, c’est de parvenir à bien montrer le lien qui existe entre la généralisation du multimédia et la perte d’identité et d’indépendance des titres. Cela, intuitivement, peut sembler évident, mais comment expliquer, ne serait-ce qu’à nos confrères en mal de modernité, en quoi cette montée en puissance du multimédia, si elle n’est pas négociée au regard des principes qui fondent notre profession, annonce une atteinte grave à notre liberté. Au delà, bien sûr, c’est l’ensemble de la société qu’il faut alerter sur le fait que l’on veut remplacer l’information du citoyen par "la vente de minutes de cerveaux disponibles" (Le Lay).

Une très inquiétante confusion des genres qui réjouit visiblement Tom Glocer, le PDG de Reuters, lorsqu’il dit : "Dans le monde dans lequel nous vivons, tout le monde est consommateur, tout le monde est distributeur, tout le monde est agrégateur et tout le monde est producteur." (Libération du 30 et 31 décembre 2006).

Ou encore l’entreprise Getty Images qui a choisi comme slogan : "Nous sommes des marques et les marques sont nous-mêmes" (Libération des 6 et 7 janvier).

Dans le groupe Le Monde, Bolloré devrait bientôt lancer son nouveau gratuit sous la marque de ce quotidien du soir, de même que dans le groupe Midi Libre, combien de fois n’a-t-on pas entendu que nous avions une chance immense de pouvoir profiter de la notoriété d’un journal tel que le Monde, qui nous contrôle en même temps qu’il puise sans vergogne dans nos recettes.

Mais le cran en dessus, c’est lorsque cette marque se vend aux publicitaires. Lesquels depuis si longtemps déjà doivent nous trouver incroyablement archaïques quand nous nous entêtons à vouloir faire passer l’indépendance d’un titre avant les recettes publicitaires que celui-ci génère, et, à leurs yeux, génèrera d’autant plus que le titre sera vendu comme une marque.

Lors du dernier BN encore, le délégué syndical de La Tribune expliquait comment les publicitaires sont friands du multimédia lorsqu’il permet de coupler l’information ciblée à laquelle s’est abonnée un lecteur-auditeur-téléspectateur à des réclames qui, du coup, seront d’autant mieux ciblées sur sa personne. Un tel processus transforme donc le lecteur en consommateur.

Le développement du multimédia, présenté comme "une évolution naturelle du métier de journaliste" (direction de RFI) peut contenir le virus d’une confusion des genres, laquelle remet non seulement en cause les prérogatives du journaliste ("Place au citoyen journaliste, au lecteur qui va nous envoyer directement de l’info via le portail web, et aux Unes qui seront choisies par les internautes par vote sur le site", di le chef de la cellule Internet du Dauphiné Libéré), mais qui, plus dangereusement encore, dissout la distinction qui séparait l’information de la publicité.

Nous en sommes donc là, et je suis persuadé qu’à l’heure où aux Etats Unis, par exemple, des parents n’hésitent plus à donner pour prénom à leurs bébés le nom d’une marque, nous ne pourrons résister à ce triomphe annoncé des marques qu’en alertant bien au delà de notre seule profession. Si notre revendication portant sur l’indépendance juridique des Rédactions me semble, en l’état actuel des choses, une (sinon la seule) réponse appropriée, elle aura plus de chances d’aboutir si d’autres que nous comprennent combien serait précieux pour la démocratie l’instauration d’un tel garde fou. A nous de la poser de telle sorte qu’elle devienne évidente aux yeux de tous ceux pour qui le monde, pas plus qu’une information digne de ce nom, ne peut être réduit à l’état de marchandise.

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