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Communiqués de presse

Audiovisuel public : « réenchantement » et mauvais coups


En pleine préparation de la réforme de l'audiovisuel public, le Sénat organisait donc ce 12 juillet un colloque étrangement intitulé « Comment réenchanter l'audiovisuel public à l'heure du numérique ».

En ouverture, un sondage "OpinionWay", avec des questions plutôt à charge contre le Service public, et quelques chiffres, repris dans la page d’accueil du programme, mais nulle part de comparatif pourtant indispensable des différents taux de redevance en Europe : 300€ pour l'Autriche, le plus fort, 138€ pour la France, l'un des plus faibles d'Europe.

Parmi les intervenants : des ministres (Françoise Nyssen et Jean-Michel Blanquer), des parlementaires, des dirigeants de l'audiovisuel public en Europe (RTBF, BBC, RAI), en France (Arte, Radio France, France TV), de l'audiovisuel privé (TF1), des membres de sociétés d'auteurs (SCAM, SACD) et d'associations de réalisateurs, la ligue de football professionnel (LFP), ainsi que Catherine Smadja, en charge, pour le ministère, de présenter des propositions de réforme.

Aucun représentant du personnel, aucun membre d’un syndicat de l'audiovisuel public n’a été invité à s’exprimer ! Ce n’est, hélas, pas qu’un symbole.

Derrière la vitrine du « réenchantement », les mauvais coups se préparent. Au cours de la journée, plusieurs intervenants ont pu tranquillement, appeler à :

► la fin d'une « culture de la dépense » (sic) dans l'audiovisuel public ; 

 la baisse des budgets affectés aux différents médias publics ;

► un « rapprochement » (pour ne pas dire fusion) des sociétés de l’audiovisuel public ;

 la fin de l’information nationale sur France 3 ;

 la réduction du catalogue de droits sportifs de France Télévisions, etc.
 

La palme du cynisme revenant à l’un des organisateurs du colloque, le sénateur Jean-Pierre Leleux, tout jovial quand il annonce au micro qu'il souhaite que l’audiovisuel public perde « au moins » 10% de sa masse salariale d’ici 2022 ! On a connu discours plus "enchanteur" !

Ce colloque n’augure décidément pas grand-chose de bon pour les salariés des médias publics. La réforme, « une priorité de l'exécutif » selon les mots de Françoise Nyssen, se fera sans les écouter, ou si peu. Pire : cette réforme pourrait se passer d’un grand nombre d'entre eux, via une réduction des effectifs.

Interrogé à ce sujet lors du colloque, Takis Candilis (directeur général de France Télévisions), ne s'est pas montré franchement rassurant : 
« On attend d'en savoir plus ». Au moment où il est vital de s’organiser pour conserver notre « exception culturelle » française en face des géants mondiaux que sont les GAFA et Netflix , il est vital de ne pas affaiblir le Service public mais bien au contraire de le renforcer.

Il faut dire qu'au même moment, à France Télévisions, la direction agit sans ménagement et enchaîne les procédures de licenciement à l'encontre de salariés, en régions comme à Paris. Trois journalistes très expérimentés viennent d'en être victimes. A chaque fois, le SNJ a vivement contesté ces procédures à charge.

L'éviction scandaleuse de Jean-Marc Pitte, reporter à Rouen, a provoqué une grève au mois d'avril dernier.

C'est ensuite Hélène Risacher, directrice adjointe des magazines d'information, qui a été virée pour avoir osé contester des coupes budgétaires imposées à ses équipes.

Aujourd'hui, c'est Joseph Tual, enquêteur à la rédaction nationale de France 3, qui est mis à la porte. Les "faits graves" qui lui sont reprochés : avoir vivement protesté après des arbitrages éditoriaux de sa hiérarchie qui ne lui ont pas permis de traiter l’affaire dite du financement libyen de la campagne électorale du candidat Sarkozy.

Trois journalistes présents dans nos rédactions depuis plus de 25 ans, trois professionnels reconnus qui sont brutalement frappés par des procédures iniques, expéditives et déséquilibrées. 

Dans un climat anxiogène nourri par les déclarations du président de la République, du gouvernement et de certains parlementaires, ce management brutal est insupportable et irresponsable. Quel crédit accorder à une direction qui mettrait en place une politique de "l'exemple", où tout salarié qui sort du rang se retrouverait sous la menace d'un licenciement ? Quelles conséquences pour la qualité de l’Information due à nos concitoyens, pour le dialogue social dans nos entreprises, quels dangers pour la santé des salariés ?

Le SNJ, aux côtés des journalistes licenciés, appelle les dirigeants de France Télévisions, ainsi que les responsables politiques, à ne pas oublier que le "réenchantement" du Service public ne peut pas se faire sans l'adhésion de ses équipesAu contraire : l'avenir des médias publics passe par un dialogue sincère, constructif et serein, débarrassé des nombreuses épées de Damoclès qui pendent au-dessus des têtes des salariés.

Le Service public dont les actionnaires sont les citoyens qui lui font confiance et ils sont majoritaires, ne doit pas être victime de petits calculs politiciens et des puissances de l’argent qui les commandent.
 

Paris, le 13 Juillet 2018

Thèmes : Médias audiovisuels

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