Intelligence artificielle, gare à toi !
Ce lundi 6 novembre, la direction de l'Est républicain a convoqué les élus en CSE extraordinaire pour une "reprise de l’information consultation sur l’utilisation de l’intelligence artificielle dans le métier d’éditeur".
Un rétropédalage complet après sa saute d’humeur du CSE d’octobre lorsque, suite à l’annonce par les membres du CSE de la désignation d’un expert habilité pour évaluer, entre autres, les enjeux économiques, financiers, éditoriaux et d’emplois liés au déploiement de cette nouvelle technologie conséquences éditoriales, le directeur général de l'Est républicain, Christophe Mahieu, avait quasiment claqué la porte.
Est-ce de sa propre initiative ou un coup de semonce du président d’Ebra, Philippe Carli ? Le directeur général, Christophe Mahieu, est revenu ce lundi 6 novembre matin, comme si l’épisode précédent avait été effacé du disque dur, rétablir le dialogue social sur un projet « plus que jamais, à mes yeux, très important pour l’entreprise. Et sur sa capacité à se saisir, ou pas, de cette nouvelle technologie. Cela reste un enjeu majeur. »
Mais, surtout, une menace avérée pour l’emploi des journalistes, en particulier les secrétaires de rédaction, au cœur de ce dispositif expérimental qui confie à l’intelligence artificielle, des tâches éminemment rédactionnelles. Et pourrait produire, même s’il ne s’agit pas de l’intention initiale, de l’aveu de la direction, des effets létaux sur l’emploi à terme. Lorsque le ver est dans le fruit, difficile de l’en déloger…
Le SNJ, soucieux de protéger le métier de journaliste et une qualité de l’information sourcée, vérifiée et qui résulte uniquement de cerveaux humains, veut absolument garder la maîtrise de l’utilisation de ce robot conversationnel. C’est pourquoi il a insisté sur l’importance de cette expertise, validée par l’ensemble de élus SNJ et Est Média CGT, pour apporter des éclairages précis et déterminer quels sont les risques, faibles, modérés ou à proscrire pour la profession.
La direction a indiqué que l’expérimentation commencera le 22 novembre pour une durée de trois mois, les deux derniers mois étant couverts par l’expertise. Elle concernera l’édition de Lunéville montée par le secrétariat de rédaction de l’UG 54/55 où quatre ou cinq SR, sur la base du volontariat, testeront ce processus en production sous la coupe d’un « référent SR chef de ce pôle ». En l’occurrence Julien Beneteau. A la demande des élus du SNJ, acceptée par la direction, un CDD sera affecté en renfort dès le lancement de l’expérimentation. Par ailleurs, un point d’étape sera réalisé à chaque CSE. Une attention particulière sera aussi portée au fonctionnement de Vosges Matin qui intègre des copilotes.
Enfin, les élus du SNJ, comme ils l’avaient déjà réclamé lors du temps d’échange du 9 octobre dernier puis du CSE du 26 octobre, ont insisté ce lundi sur la nécessité d’encadrer l’usage de ce nouvel outil, ce projet d’entreprise, par un accord organisationnel et fonctionnel s’appuyant sur les conclusions de l’expertise, sur les retours de l’expérimentation et, cela va de soi, sur les textes, accords et chartes qui régissent la profession.
« Nous n’en sommes qu’à la préhistoire de l’intelligence artificielle », a conclu Christophe Mahieu. Charge à nous tous d’éviter un big-bang. Qu’elle se nomme ChatGPT, Midjourney, Bard… l’intelligence artificielle envahit le quotidien des citoyens et déferle sur les entreprises de médias, avec des risques grandissants sur les emplois, l’organisation des rédactions, les droits d'auteur, la formation des jeunes journalistes et, in fine, la qualité de l’information. Comme il vient de le faire, en créant un véritable électrochoc médiatique d’ampleur national, reflet de l’intérêt majeur que portent les journalistes et les médias pour cette nouvelle technologie, le SNJ se définit comme un lanceur d’alerte vis-à-vis des utilisations qui pourraient remplacer les journalistes par cette moulinette sans cœur dont on ne connaît pas encore complétement le pouvoir de destruction.