La crise n’est pas la réponse à tout !
Madame la présidente,
Lors de la séance du CSE Central du 15 avril dernier, le sort de France 4 et France Ô avait été abordé et vous aviez alors précisé que les décrets concernant les fermetures de ces deux chaînes n’étaient pas encore signés. Nous pouvions donc espérer un maintien de ces chaînes sur la TNT ! A l’époque, il faut l’avouer, nous étions très loin de penser qu’il faudrait attendre jusqu’au mois de juillet pour connaître les arbitrages de Franck Riester ! Enfin, au point où nous en sommes, il faut envisager que ce soit un autre ministre de la Culture qui annonce la décision du gouvernement, dans les prochaines semaines…
D’ici là, les salariés de France Télévisions, en particulier ceux qui travaillent pour ces antennes, ont le sentiment d’avoir été placés « en attente » pendant deux mois et demi, puis d’avoir été oubliés par nos interlocuteurs. Ce retard, personne ne semble vouloir l’assumer puisque le ministre de la Culture indiquait aux organisations syndicales, fin mai, qu’il venait tout juste de recevoir les documents lui permettant de prendre une décision motivée.
Même si la direction tente d’accompagner et de soutenir les équipes de France4 et France Ô, c’est indéniable, ce retard aura mis une pression inutile sur les équipes. Un stress supplémentaire qui sera plus facile à évacuer si France 4 et France Ô sont maintenues sur la TNT, ce que nous espérons toujours. Dans le cas contraire, cette attente inutile aura été un épisode pénible, un de plus, dans la gestion de ce dossier.
Autre attente difficilement supportable, celle que subissent des milliers de salariés non-permanents de France Télévisions. Fin mai, trois organisations syndicales représentatives ont signé avec la direction un accord sur la mise en place d’un fonds de soutien. Nous sommes maintenant en juillet et de très nombreux CDD, pigistes ou intermittents n’ont toujours pas reçu le moindre message personnel, le moindre mail pour confirmer leur éligibilité au fonds de soutien. Nous regrettons une nouvelle fois que la direction affiche, depuis trois mois, une telle différence de traitement entre ses salariés permanents et les autres.
Incertitude aussi pour les salariés qui travaillent dans les stations, en outremer, en régions ou au Siège. Le retour à une situation normale, ou quasi normale, c’est pour quand ? La reprise d’activité liée aux élections municipales n’a pas permis de lever les doutes sur la place du télétravail ou sur le retour à des méthodes de travail traditionnelles, notamment en montage ou en production. Le calendrier de reprise progressive est encore flou dans de nombreux sites, et il est trop rarement construit avec les salariés et leurs représentants. Sans oublier que des mauvaises habitudes se sont installées, notamment un « casting » imposé trop souvent aux équipes des éditions nationales d’information. Il nous faut l’assurance que cette pratique insultante, humiliante, qui divise les équipes, cesse à l’avenir. Elle a créé énormément de traumatismes à un moment où chacun participait du mieux possible aux efforts dans le cadre de notre mission de Service Public. Un directeur mal inspiré a même osé la comparaison, en parlant de salariés, entre des « 2CV et des Ferrari ». Une expression scandaleuse qu’il aurait dû laisser au garage. Des centaines de salariés sont donc appelés à partir en vacances dans les prochains jours sans vraiment savoir dans quelles conditions ils reprendront le travail.
Inquiétude enfin pour l’avenir de l’emploi au sein de France Télévisions. En 2019, la direction avait annoncé un plan de recomposition des effectifs de l’entreprise étalé jusqu’en 2022 mais aujourd’hui, nous voyons surtout les départs et quasiment pas les recrutements. Or, sans une politique ambitieuse de recrutement, comment « recomposer » les effectifs, équilibrer la pyramide des âges et soutenir les projets de développement ? Le SNJ avait négocié mais n’avait pas signé la version finale de l’accord de mai 2019, estimant que les garanties sur les recrutements étaient trop faibles. A ce stade, nous déplorons que l’application de l’accord nous donne raison, et nous craignons que la crise sanitaire devienne un prétexte.
Toutes ces questions en suspens s’ajoutent évidemment à l’incertitude autour de la gouvernance de France Télévisions, mais celle-ci revient tous les cinq ans et elle fait partie de la vie de l’entreprise. En revanche, nous souhaitons que tous les sujets essentiels que nous venons de citer soient abordés et débattus sérieusement au cours de ce CSE Central. La crise sanitaire ne fait pas encore partie de notre passé, elle pèse encore sur le présent, mais elle ne peut pas justifier durablement toutes les incertitudes qui affectent aujourd’hui France Télévisions et ses salariés.