La famille cohérente de presse retoquée
C’est un joli camouflet pour le Crédit Mutuel et sa stratégie de mutualisation des contenus à marche forcée. Saisie par le SNJ, au Progrès, alors que la négociation achoppait sur les questions liées au périmètre de la cession automatique, la commission pour les droits des journalistes (CDAJ) vient de rendre une décision qui fera date. Dans le groupe EBRA d’abord où les négociations sur les droits d’auteur dans chacun des titres étaient suspendues à la décision de la commission nationale paritaire d’arbitrage.
Au-delà ensuite, puisque la démonstration est faite que la notion de famille cohérente de presse, sur laquelle s’arcboutent les patrons de presse pour sécuriser juridiquement les synergies rédactionnelles, peut être combattue et repoussée, dès lors que les organisations syndicales s’en donnent les moyens.
Le Syndicat national des journalistes (SNJ), première organisation de la profession, considère que la nécessaire diversification des contenus, dans le contexte d’une presse écrite en crise, peut et doit s’imaginer dans le respect du pluralisme, de l’identité des titres et de l’indépendance des rédactions.
Après avoir officiellement acquis en 2011 le groupe L’Est Républicain, pour devenir le premier éditeur français de presse quotidienne régionale (*), la Banque fédérative du Crédit Mutuel (BFCM) a créé à l’automne un bureau d’informations générales multi-titres à Paris, et a engagé un important processus de concentration.
Ce que souhaitait la direction du Progrès, à travers la négociation droits d’auteur, c’était la validation d’une famille cohérente de presse sur le pôle Bourgogne-Rhône-Alpes du groupe EBRA, élargi à l’Est Républicain pour systématiser des échanges dans la zone Franche-Comté.
La commission vient de renvoyer les parties à négocier sur les bases d’une rémunération fixée en 2008 pour les nouveaux embauchés (620 euros), incluant une cession automatique sur le périmètre du titre, élargi aux articles parus dans cinq éditions locales frontalières du Dauphiné Libéré, du Bien Public et du Journal de Saône-et-Loire uniquement, correspondant à des échanges anciens entre ces titres, en application d’un accord remontant à 2001.
Pas de famille cohérente de presse, donc, reste à finaliser un accord désormais encadré par la décision de la commission, qui vient pour la première fois d’imposer un montant, en face d’un périmètre de cession.
Pas de famille cohérente de presse, mais rien n’est réglé sur le front de la mutualisation forcée, dans un groupe où les pressions se font de plus en plus fortes, sur les individus, afin qu’ils cèdent gratuitement leurs droits au groupe. Avec ou sans accord collectif le prévoyant.
(*) La BFCM est propriétaire à 100% de neuf journaux : L’Alsace/Le Pays, le Républicain Lorrain, L’Est Républicain, Vosges-Matin, les DNA, le Journal de Saône-et-Loire, le Bien Public, le Dauphiné Libéré, Le Progrès.