"Marianne" a besoin d'un projet, pas d'un plan social déguisé !

"Marianne" a besoin d'un projet, pas d'un plan social déguisé !

Quel avenir pour l'hebdomadaire Marianne ? Ces dernières semaines, la rédaction se vide peu à peu de ses forces. Confrontés à l'attitude intransigeante du propriétaire du titre, l'hommes d'affaires Daniel Kretinsky, les salariés sont usés, découragés. Le projet de reprise (sous forme de coopérative) soutenu par la rédaction a été brutalement rejeté par les dirigeants. Le dialogue social semble coupé. Sans autre perspective qu'un déclin éditorial, les journalistes se résignent à prendre la porte, les uns après les autres... Une aubaine pour une direction qui vise l'austérité budgétaire, mais une triste fin pour l'équipe rédactionnelle. 


Le 13 février, dans une tribune publiée par Le Monde, la Société des Rédacteurs de Marianne (SRM) résumait ainsi le projet de l'actuelle direction : "Accompagner la baisse du nombre des lecteurs par une baisse notable, voire drastique, des effectifs et, possiblement, de la pagination. En clair, le projet de CMI consiste en une gestion peu enthousiasmante de notre fin de vie". 


Dans le même texte, la SRM exposait le projet alternatif des salariés : "un essai clinique innovant, un remède cohérent, justement, dont nous pressentons qu’il permettra de prolonger notre espérance de vie (...). Une offre qui vise à terme à faire de l’entreprise Marianne une société coopérative d’intérêt collectif (SCIC)". 
Hélas, quelques jours plus tard, Denis Olivennes et Valérie Salomon (président du conseil de surveillance et présidente de CMI France, le groupe qui possède Marianne) opposent une fin de non-recevoir à cette proposition… alors que le propriétaire était vendeur il y a un an ! Dans le même temps, on apprend que la direction a ouvert grande la porte de l'entreprise, incitant au départ de nombreux journalistes. Un plan social déguisé, qui utilise improprement le principe de "clause de conscience", dans le seul but de démanteler la rédaction et d'en diminuer la masse salariale. D'après les informations de La Lettre, près d'un tiers des journalistes ont quitté ou vont prochainement quitter Marianne. L'hebdomadaire s'en remettra-t-il ? 


Le Syndicat National des Journalistes (SNJ), première organisation de la profession, apporte son plein soutien à l'équipe rédactionnelle de Marianne. Nous soutenons également les initiatives qui permettraient à son projet éditorial de vivre et de se développer (en dehors de la sempiternelle concentration des médias qui anémie le pluralisme) avec une gouvernance démocratique. 
Le SNJ en appelle à nouveau aux pouvoirs publics et aux parlementaires pour que cessent ces purges sociales, avec des milliardaires qui rachètent des titres et s'attaquent à leur projet éditorial en les vidant de leurs journalistes, afin de ne garder que la marque. La presse française doit être protégée par un cadre législatif qui garantisse l'indépendance des rédactions et le pluralisme. Le SNJ propose à nouveau d'inscrire dans la loi, dès 2025, le principe de l'indépendance juridique de l'équipe rédactionnelle*. 
Le pouvoir de l'argent et de "l'actionnaire" ne peut pas être illimité, en particulier quand il s'agit d'information, et donc d'un des piliers de la démocratie. N'attendons pas pour protéger les rédactions !


* https://www.snj.fr/sites/default/files/documents/Contribution%20EGI.pdf


 

Paris
Mercredi 26 février 2025
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