Pas de « saison 2 » sans moyens supplémentaires
Lettre ouverte des élus SNJ du Progrès à Philippe Carli.
Monsieur le Président,
Vous venez ce mercredi 13 avril, devant les élus des deux CSE du Progrès, puis devant les salariés du journal, exposer les grandes lignes des orientations stratégiques du groupe EBRA, à l’aube de ce que vous avez appelé la « saison 2 ». Votre venue tombe à pic, quelques jours après un mouvement de grève observé par près de 90% des journalistes, exaspérés par la politique de l’entreprise, les effectifs en baisse, la charge de travail en hausse, l’insuffisance de l’investissement en moyens humains et matériels, au regard des exigences de la révolution numérique engendrée par le plan digital first. Cette grève du 7 avril fait écho aux mouvements similaires survenus la semaine précédente, dans le groupe, au Républicain Lorrain et à l’Est Républicain.
Au-delà de vos éléments de langage, qui font le bonheur des gazettes économiques depuis le début de l’année, nous n’avons pas la même vision de la « saison 1 », que vous considérez comme réussie. Pour rappel, les objectifs du plan 2017-2021 étaient les suivants : « adapter les organisations pour réduire la structure des coûts », « préserver les revenus historiques », « développer les revenus digitaux », « diversifier », aller vers un « nouveau pacte social ».
Au niveau comptable, il s’agissait de gagner 115 M€ de productivité au niveau du groupe, dont 60 M€ en réduction de coûts, et 50 M€ en progression de revenus. Ce plan a généré plusieurs opérations socialement lourdes : réorganisation des centres d’impression dans l’Est, PDV dans les rédactions, plan Ebra services, plans PRIM.
Si nous nous réjouissons d’un retour à l’équilibre, annoncé pour le groupe EBRA comme pour BJP et Le Progrès, nous ne sommes pas dupes de ce bilan en trompe-l’œil, porté par la réduction massive des charges salariales, sans le « décollage » annoncé des recettes liées au web, notamment en terme d’abonnements numériques.
Surtout, ces quatre années ont laissé les rédactions exsangues, épuisées par la multiplication des nouvelles tâches, dans un contexte de pénurie imposé par nos directions. Il est déplorable que nos dirigeants n’aient pas pris la mesure du mécontentement exprimé mois après mois par les représentants du personnel, dans les CSE. Le groupe EBRA, chantre de l’homologation RSE de qualité, est-il prêt à s’auto-satisfaire d’un « dialogue social » à sens unique, consistant à siffler les organisations syndicales dès qu’il s’agit de leur faire signer un plan social, et fermer les yeux le reste du temps ?
Remplacements d’arrêts maladie a minima, départs en ruptures conventionnelles non remplacés, dotation en matériel inadaptée ou insuffisante, formations dispensées par tutos et proches du néant… Pendant ce temps, l’augmentation du coût de la vie s’accélère, et pèse de plus en plus fort sur le pouvoir d’achat des salariés. Avant de démarrer, la « saison 2 » devra sérieusement prendre en compte les conditions de travail de tous, et reconnaître les efforts fournis par tous.
Nos lecteurs attendent des informations de qualité sur le fond et la forme. Les journalistes attendent des moyens pour exercer correctement leur métier.
Ces derniers ont montré la semaine dernière qu’ils savaient se mobiliser. Cet élan collectif, nous ne le trahirons pas.
Les élus SNJ du Progrès