Une réforme de l’assurance-chômage scandaleuse et catastrophique pour les journalistes les plus précaires
Dans un contexte où le nombre de journalistes précaires ne cesse d’augmenter, la réforme des règles de l’assurance-chômage entrée pour partie en vigueur le 1er novembre est très inquiétante pour l’ensemble de notre profession. Cette réforme, dont l’objectif comptable est de diminuer le nombre de demandeurs d’emploi indemnisés mais aussi le montant des indemnisations, risque de se traduire par une paupérisation accrue des journalistes les plus précaires, ceux rémunérés à la pige et/ou ceux qui enchaînent les CDD.
Depuis le 1er novembre, il faut désormais avoir travaillé 6 mois sur les 24 derniers mois (au lieu de 4 sur 28) pour pouvoir prétendre à une indemnisation de Pôle Emploi. Les journalistes qui n’ont d’autres choix que d’alterner CDD, parfois d’un seul jour, et des piges, avec des périodes sans emploi, auront encore plus de difficultés aujourd’hui qu’hier à obtenir une maigre indemnisation par Pôle Emploi.
Le principe du « rechargement des droits » est, en outre, considérablement durci. Dorénavant, il est nécessaire d’avoir travaillé là encore au moins 6 mois ou 910 heures pour « recharger » ses droits (contre 1 mois avant la réforme), c’est-à-dire ouvrir de nouveaux droits lorsque ceux acquis lors d’une précédente rupture de contrat de travail sont épuisés. Le principe du report des droits serait maintenu (toute période travaillée reporte d’autant la durée d’indemnisation). Mais les journalistes précaires qui vivaient tant bien que mal en « rechargeant leurs droits » de mois en mois vont se retrouver dans une situation financière intenable.
Le deuxième volet de cette réforme scandaleuse, présentée comme nécessaire au regard d’une prétendue dette de l’assurance-chômage construite par un gouvernement qui ne cesse de se désengager du service public de l’emploi, alors que des millions d’euros ont été gracieusement octroyés aux employeurs, sera mise en œuvre au 1er avril 2020. Cette lame de destruction du principe de l’assurance-chômage, dont nous n’avons pas encore toutes les modalités, est encore plus inquiétante.
Le montant des indemnités sera alors calculé non plus à partir des salaires touchés sur les seuls jours ou mois travaillés dans les 12 mois précédent la perte d’un emploi mais sur le revenu mensuel moyen des 24 derniers mois (36 pour les plus de 53 ans) incluant les périodes d’inactivité. Ce nouveau mode de calcul pénalise directement les salariés dont l’activité est discontinue comme les journalistes pigistes et les journalistes en CDD. C’est inacceptable ! De nombreux journalistes sont dans l’obligation d’alterner périodes travaillées et périodes non-travaillées en réponse aux besoins des employeurs.
Les journalistes précaires ne sont pas les seuls concernés par cette réforme. Le gouvernement a en effet introduit le principe d’une dégressivité des allocations, à compter du 7e mois, pour les salaires mensuels supérieurs à 4 500 € bruts. Cette dégressivité des allocations est un premier pas vers une dégressivité des allocations pour tout un chacun.
L’Union syndicale Solidaires, dont le SNJ est membre fondateur, a déposé un recours devant le Conseil d’Etat avec d’autres fédérations syndicales pour contester cette réforme. Le Syndicat national des journalistes, première organisation de la profession, attend beaucoup de ce recours. Quoiqu’il en soit, le SNJ sera vigilant pour que les confrères et consœurs précaires et demandeurs d’emploi ne basculent pas dans la pauvreté au nom d’une prétendue dette de l’Unedic.